France

Les pauvres paieront

« Dans un contexte où 10% des Français-e-s les plus riches détiennent déjà plus de la moitié des richesses, la réforme fiscale annoncée risque de creuser encore davantage les inégalités. Les 10% les plus riches bénéficieront d’une hausse de revenus au moins 18 fois plus importante que les 10% les plus pauvres pendant que les contributions fiscales des entreprises seront largement réduites alors que leurs bénéfices explosent » - dit Oxfam dans une étude publiée le 25 septembre 2017.
Nous avons vu dans plusieurs billets de ce blog (ici et ) que les inégalités se creusent partout dans le monde et que la tendance est à l'accélération de ce mouvement, comme cela s'est produit aux États-Unis d'Amérique du Nord pendant ces dernières années. Or, on sait maintenant que les inégalités sont bien plus importantes que celles qui ont été mesurées à partir des chiffres officiels.

Les milliards de l'inégalité

654px-Hedge_funds_and_tax_haven-fr.svg.pngDans plusieurs billets de ce blog j'ai fait état d'études pointant les inégalités en France et dans le monde ainsi que de leurs conséquences y compris sur une partie de l'humanité à naître. Cette inégalité n'est pas un état de nature, mais une construction qui, dans le monde d'aujourd'hui, est patiemment entretenue et accrue par des règles imposées aux peuples par diverses formes de violences et d'outils de contrainte et de contention, qui, parfois au nom de la justice sociale et de l'ordre public assurent la répression nécessaire au maintien et au développement des politiques de spoliation des faibles et d'accroissement de la richesse et du pouvoir des nantis. Ainsi, comme nous le savons pertinemment, des outils de défiscalisation, de quadrillage du monde (comme les frontières), des lois sur la circulation des capitaux, des institutions bancaires tentaculaires et opaques sont mis en place pour que les fortunes les plus importantes de chaque pays puissent échapper à la redistribution, à la solidarité, au financement de la vie commune dans la société. Par contre, des outils de contrôle des revenus des petites gens assurent qu'aucun ou presque n'échappera aux taxes, cotisations, impôts, péages, frais et amendes qui iront financer l'ensemble des institutions publiques qui garantissent paix, tranquillité, options de fraude et opportunités d'enrichissement aux plus fortunés en organisant, par le pouvoir d'État, un monde à leur service.

Le choc de la libéralisation

Avec le gouvernement actuel, il n'y a pas que le montant des APL qui baisse. Les impôts baissent aussi, de 11 milliards. 11 milliards au total, si on tient compte des hausses de 2,6 milliards (tabac, fiscalité écologique) et des baisses par ailleurs de 13,5 milliards. Sur ces 13,5 milliards de baisses des impôts, certaines ont été décidées par le gouvernement précédent : 4,5 milliards pour les entreprises (taux du CICE qui passe de 6 à 7 %, crédit d'impôt sur la taxe sur les salaires qui baisse d'un demi-point). Le gouvernement y ajoute 7 autres milliards : une baisse du prélèvement forfaitaire unique sur le capital, la suppression d'une première tranche de taxe d'habitation et la suppression de l'ISF, l'impôt sur la fortune, 3 milliards chacune.

Les inégalités en France en 2017

Chaque année, l'Observatoire des Inégalités produit un rapport sur l'état des inégalités en France.  Le rapport 2017 a été publié au mois de juin, grâce à un financement participatif. Ce rapport est en vente sur le site, mais on peut télécharger sa synthèse en quelques tableaux clairs, explicites et extrêmement instructifs.
On y apprend qu'un peu plus du quart des revenus est détenu par 10% de la population. Ce que ne montre pas ce tableau c'est la répartition de cette distribution au sein même de ces 10%, mais il ne serait pas étonnant que, comme dans une fractale, on retrouve le même schéma distributif.
pauvrete.pngAlors que la France n'a pas connu de récession depuis 2004 (contrairement à des pays comme la Grèce), on voit qu'en dix ans le nombre de personnes pauvres a augmenté à la fois en nombre et en taux. C'est une tendance lourde qui revient de rapport en rapport, d'étude en étude, de statistique en statistique. Cela ne manque pas de nous interroger sur une tendance du type de celle constatée aux États-Unis d'Amérique, évoquée dans ce billet. Pourtant, depuis cette date, nous n'avons pas manqué d'annonces politiques et de ces invectives sur « l'assistanat » qui voudraient nous faire croire que la pauvreté est un choix (alors que la richesse serait un effort).